LXXVII

Lui, Seul, Un !

As-tu connu l’océan du Latif, اللاطيف ?

C’est l’encrier sans rivage,

Réservoir de Sa  Parole incréé,

Source des allusions subtiles 

Et des significations lumineuses.

As-tu versé ton âme dans le Livre du Latif ?

Cent quatorze chapitres 

Composés d’une unique phrase

Synthétisée en un mot

Contenant une seule lettre

Enroulée dans un point

Effacé dans le Tout de Sa Miséricorde infinie.

As-tu conçu le cœur du Latif ?

Lām ل de la Révélation créatrice des mondes

Alif-nūn أن projection du Principe sur le plan existentiel 

Alif ا de l’Être des êtres innombrables,

Tā ط qui uni ton périple terrestre à ta voie verticale,

Alif-sād اص projection du Principe dans l’alcôve des poitrines 

Yā ي de la vie du souffle du Vivant,

Fā ف de l’indigence absolue dans la Seigneurie du Subsistant 

LXXVI

La preuve !
Je l’ai saisie !
Ici, juste à la pointe du cœur !
Graine de sénévé qui porte en germe de Vérité
Un arbre immense !
L’Arbre de tous les arbres !
Ni d’Orient, ni d’Occident,
Ni du Midi, ni du Septentrion
Ni du Nadîr, ni du Zénith !
Arbre du Centre, Arbre de l’Univers,
Racine du Souvenir, ramure des Connaissances !
Sur chacune de ses feuilles, Il a écrit un verset de sa Parole inépuisée !
Souhoufi Ibrahima ! Feuillets d’Ibrahim !
Tradition première à jamais préservée !
Parole multiple et unique à la fois !
Alif, lam, mîm ! ا ل م !
Unité, Descente du Verbe, Miséricorde pour les mondes !
Yā, sin ! ي س !
Celui qui préserve, Paix immense !
Préservation de la Nature première !
Tā, hā ! ط ه !
Purification, guidance !
De l’Unique émane un verbe continu, fleuve de tendresse pour les créatures,
Par la vertu des noms de l’invocation,
Il conserve à chaque être sa forme primordiale,
Il purifie et dépouille les écorces et les oripeaux,
Il est le flambeau des routes nocturnes et le phare des navigations océanes.
Par Lui tout est écrit sur la Table des Secrets,
Nul ne l’atteint par le regard, mais Il atteint tous les cœurs !
En Lui, le retour des âmes bien nées et le refuge des esseulés !
En Lui, l’Amour natif et la giration des amants éperdus !
En Lui, le Livre des livres marqué du sceau de la Certitude absolue.

LXXV


L’Homme véritable est présent au dedans de tout être, en son juste milieu,
Couvert par le Ciel immense, comme un dais au-dessus de l’empereur,
Porté par la Terre des quatre horizons, comme un roi en son palais…
De l’un à l’autre, il court parcourant l’Arbre du Vivant, Axis mundi,
Dans sa course ascendante, il détruit les scories du vieux monde,
Dans sa course descendante, il répand la pluie et coagule les créatures nouvelles,
Car à sa cime, l’Arbre se nomme figuier de l’effacement et de la dissolution universelle,
Et à sa racine, il revêt les vertus de l’olivier de la subsistance en Lui et de la multiplicité.
En s’élevant dans la ramure, l’Homme alchimique se nourrit de l’Esprit,
dissolvant l’inutile et l’épais,
En s’abaissant, il cristallise les effluves et la sagesse du Ciel.
Parvenu au sommet, il a signé l’extinction de son âme focalisée alors dans la nukta,
Circonscrite dans le point de la lettre nūn comme le calame en son encrier…
Ayant posé le pied au dernier échelon de l’échelle, il rassemble les âmes pures sous le manteau de la Miséricorde éternelle.

Si tu dis de lui : “Voici l’Homme Juste!”, son nom est Adam, l’Homme de tous les hommes,
Car ce nom contient l’alif ا de l’humanité verticale, le dal د des formes animales et végétales
et le mîm م des gemmes minérales
Dans sa dextre, affleure la rosée des bénédictions purifiantes
Et dans gauche, il tient la clé des quatres vents,
Il est le gardien des voies et des sentiers, son regard embrasse les six horizons
Et rien ne peut s’affranchir de son ordre car il est ce monde et tout ce qu’il contient.

LXXIV


Lumière et feu dans la poitrine,
Vois comme tournent les planètes
Dans le ciel du Vivant qui ne meurt pas !
J’ai marché le long du fleuve de lumière,
Ne crois pas qu’il inonde notre Terre
Où qu’il abreuve notre Ciel,
Cette eau coule en ton sein !
Cesse de voir et tu verras !
Cesse de lire et tu liras !
Cesse de parler, écoute Son Silence !
Ne cherche plus, Il t’a trouvé !
Le moindre instant de ta vie
A été créé pour Lui !
Ne cherche plus, laisse-toi porter
Comme Moïse dans son tabut…
Sur le Nil de la Certitude infinie !

LXXI


… Tu plonges dans la nuit de ton âme…
… Si ce monde s’éloigne, surgit la lettre verticale ا,
D’un trait de calame, elle signe sur sur ton feuillet cordial Son ipséité absolue,
A l’instant même, suivent deux lettres verticales ل qui signent la descente de Son Ange et de Son Livre
Suivies d’une ronde ه, Miséricorde pour les mondes en leur devenir et achèvement.

Si tu les assembles en un souffle cordial, tu recevras le Nom ineffable de Sa Présence invisible الله.

Abaisse ton âme et élève ton cœur !
Lors tes lèvres s’empliront de «Lui, Il est Lui» هوهو!

Lors, au feu du souvenir, les larmes perleront à tes paupières pour adoucir ta peine d’être séparé dans Son Absence.

Et tu sauras que cette absence est le vêtement de Sa Présence.

Car Il est Celui qui est et ne se dévoile sauf à le voir dans les replis des créatures.

Car Il est Celui qui garde le silence mais qui te parle par Ses Noms.

Car Il est Lui sans commencement,
Car Il est Lui sans fin,
Car Il est Lui sans lieu pour le cerner,
Car Il est le retour et la fin de l’exil.*


*Waridat inspirations wird récitation Clarté envoyé.
فَمَن يُرِدِ اللّهُ أَن يَهْدِيَهُ يَشْرَحْ صَدْرَهُ لِلإِسْلاَمِ وَمَن يُرِدْ أَن يُضِلَّهُ يَجْعَلْ صَدْرَهُ ضَيِّقًا حَرَجًا كَأَنَّمَا يَصَّعَّدُ فِي السَّمَاء كَذَلِكَ يَجْعَلُ اللّهُ الرِّجْسَ عَلَى الَّذِينَ لاَ يُؤْمِنُونَ
«Et puis, quiconque Allah veut guider, Il lui ouvre la poitrine à l’Islam. Et quiconque Il veut égarer, Il rend sa poitrine étroite et gênée, comme s’il s’efforçait de monter au ciel. Ainsi Allah inflige Sa punition à ceux qui ne croient pas.»

LXX

Quand se lève l’index de ma destre, voici la mer océane !

Quand se lève l’index de ma senestre, apparaît la rive continentale !

Mon sentier courre entre la rive de la Loi immuable et l’océan de la Vérité insondable !

Si tu choisis la terre, 

Revêts-toi du manteau de la protection 

Et préserve-toi du chatoiement des êtres innombrables ! 

Écoute la beauté du saule frémissant au bord de son étang,

Puise la grâce dans la plume de l’aigrette qui danse au vent de l’été, 

Saisis le bonheur dans le sourire de l’enfant qui joue sur le sable de l’insouciance…

Parcours cette contrée sans relâche… et passe !

Recueille la perle d’unité dans la contemplation de l’olivier et du figuier…

Sans un instant lâcher le compas et le sextant.

Si tu plonges dans l’océan, oublie-toi et abandonne toute forme connue,

Laisse au passant de fortune ton habit d’autrefois sur la rive,

Efface même ton nom de ta propre mémoire

Et ne conserve que le souvenir du souvenir.

Dans l’océan, il n’est pas une particule d’eau qui se distingue d’une autre…

La mer immuable et changeante ne livre ses secrets 

Que si tu t’absentes de toi et que tu cesses tout agir…

Conforme toi donc à l’immobilité intérieure de ton être 

Renonce et accepte de n’être plus,

Laisse aller en toi la danse de l’eau 

Laisse les créatures te traverser à leur guise 

Car c’est là le secret de l’Amour !

Pourtant, ne vas pas croire que ma voie est celle-là ou celle-ci !

Ma rive te maintient dans le vêtement des convenances,

Ton chemin, tu le suivras nus pieds sur la rive sableuse de la sécurité, à la frontière où se dissipent les vagues de la sérénité… 

Mon océan ouvre ton cœur à la beauté secrète de Ma Réalité !

LXIX

Je suis l’horizon de ta vision !

Je vois ce que tu vois,

Tu ne vois pas ce que je vois,

Ta pupille est l’encrier de mes versets,

Le parchemin de ma volonté, la paroi de ton coeur !

Ce que j’écris,  tu le fais !

Et quand sur tes genoux, mes mains  se posent,

Ta poitrine bondit !

Si je me soustrais à ta vue,

Ton âme revient à sa négligence.

Si tu plonges ton regard dans le mien,

Voici l’océan ! 

L’océan de la miséricorde et de la paix retrouvée,

L’océan de l’origine océane de ton être,

L’océan de l’Unique sans second

Dont les rives s’éloignent toujours au-delà….

Moïse, berger des âmes, prophète des passages (7)

Éloge de la nouvelle Pâque
Souviens-toi de ton père Ibrahim !
Souviens-toi de l’ordre divin !
Souviens-toi de l’obéissance !
Souviens-toi du bois et du feu !
Souviens-toi des monts de Morija !
Quand la nuit t’environne de ses voiles
Et que le jour s’éloigne à l’horizon de ta vie !
Sans le souvenir, vaine est la vie
ללא זיכרון, לשווא הוא החיים
Sine memoria, vita est in vanum
بدون الذاكرة ، عبث هو الحياة


Gloire à Isa’aq qui s’enquiert de l’agneau !
Gloire au fils qui chemine avec son père !
Gloire à l’enfant qui s’allonge sur l’autel !
Gloire à l’innocent qui se livre au couteau !
Gloire au sacrifié qui laisse filer sa propre vie !
Souviens-toi d’Isa’aq au jour de ton jugement !
Souviens-toi d’Isa’aq au jour de ton effacement !
Souviens-toi des signes de l’Éternel
זכור את הסימנים של נצחי
Memento signa aeterni Domini
تذكر آيات الله الأزلي


Il y a un dehors et un dedans !
Il y a du visible et de l’invisible !
Un enfant va mourir mais la vie lui est rendue !
Un bélier est vivant… jusqu’à la substitution !
L’obéissance est le Secret de la Pâque !
Souviens-toi d’Ibrahim au jour du destin !
Souviens-toi de l’Ange au jour de la renaissance !
Souviens-toi du Verdoyant, ce qui se voit n’est pas ce qui est
זוכר את מוריק , מה שנראה הוא לא מה שהוא
Memento, Viridis, quae videtur, non est quid est
تذكر الأخضر ، ما ينظر إليه ليس ما هو

Souviens-toi de Moïse et d’Israïl au sortir de Misr !
Souviens-toi de l’Alliance nouvelle de l’Éternel !
Car il te faut ceindre ta conscience intime
Et couvrir tes pieds en signe d’abandon
De ce monde et de l’autre !
Saisis ton bâton et conserve l’axiale !
Que l’azyme soit ta nourriture pour sept jours accomplis !
l’Égypte est un exil, Canaan est un exil, seul l’Éternel est ta patrie
מצרים היא גולה, כנען הוא גולה, רק ה ‘הוא המולדת
שלך
Aegypti est exsilium, Canaane est exsilium, solus aeternus Dominus est patria tua
مصر منفى ، كنعان منفى ، وحده الله هي بلدك

Voici venu le temps de la Pâque nouvelle
Qui sacralise ta maison par son linteau !
Que l’Éternel passe au-dessus des demeures !
Qu’Il épargne les tiens et sacrifie les leurs !
Aux sept premiers jours de la fête,
Ajoute quatorze jours sans pain levé
Afin que règne la verticale de l’Éternel.
Sa miséricorde embrasse toutes choses
הרחמים שלו מחבקים את כל הדברים
Misericordia Sua complectitur omnia res
رحمته وَسِعَتْ كُلَّ شَىْءٍ

Oratio Paschae
Je suis l’Alliance ancienne et la nouvelle !
Je suis la Révélation primordiale descendue sur l’homini primordiali !
Je suis la loi de ce monde de l’autre !
Je suis le jeûne des corps, l’occultation des âmes et l’allégresse des cœurs !
Je suis l’allégeance et la preuve !

6 dhu ai hijah 1443, 16 juillet 2021, 7 Av 5781

Moïse, berger des âmes, prophète des passages (6)

Éloge du buisson ardent
Ô Buisson de la Parole infinie!
L’Eternel a de Sa main planté ta semence
Sur le Mont de la pureté ineffable.
Et dans le coeur intime de ta graine, il a enfermé l’étincelle de l’Esprit Saint
Afin que jaillisse au jour dit le feu de la guidance prophétique !
Et que s’allume comme un phare dans la nuit la Lumière de Son Verbe…
La Parole est un feu jaillissant au milieu des ténèbres
המילה היא אש שמתפוצצת בחושך
verbum est ignem salientem in medio nocte
الكلمة نار تنفجر في وسط الظلام

Ô Buisson de la Parole unitive !
Tu es l’image terrestre du Trône céleste,
Le siège béni du Livre éternel.
Le Mont Horeb où plongent tes racines
Est l’axis des mondes et l’échelle de Jacob,
Voie verticale de la transfusion des injonctions divine,
Station de la Table gardée pour ce monde, arche de granit inaltérable de la loi immémoriale.
La Loi s’inscrit dans la pierre pour ordonner ce monde
החוק כתוב באבן כדי לסדר את העולם הזה
quod Lex in lapide scripta est, ut statuat eum mundum
الناموس مكتوب في الحجر لترتيب هذا ادنيا

Ô Buisson, phare de la Prophétie !
Ta lumière est le signe que Moïse attendait.
Mais son âme ne savait rien des ruses de l’Eternel.
Son âme plonge dans les méandres de la perplexité
Car ton feu brûle et ne consume pas !
Moïse cherche un angle de vue discriminant…
Mais « JE SUIS » a perçu son pas de côté…
L’oeil de l’Eternel voit au delà de toute vision.
עין האל רואה מעבר לכל העיניים.
oculus domini videt ultra tota visione
إن عين الرب ترى ما وراء كل أنظار.

Ô Buisson, porte parole de « Celui qui est » !
« Ô Moïse, berger des âmes ! Approche de ton Seigneur !
Ôte ta sandale de ton pied droit et dépouille le mondes des plaines verdoyantes !
Ôte ta sandale de ton pied gauche et renonce au mondes des falaises verticales !
Viens à moi, nus pieds puisque les apparences ne te trompent plus
Et que tes connaissances plus ne voilent Ma Parole
Qui dès cet instant devient pour toi une Terre Sacrée !
La voix de l’Eternel résonne en tout lieu.
קול ה ‘מהדהד בכל מקום
Vox domini resonat ubique
صوت الرب يدوي في كل مكان

Ô Buisson de la réponse !
« Me Voilà, Seigneur !
Je me voile le visage car si ton arbre ne brûle,
Mon corps et mon âme sont d’un bois corruptible
Et je crains de me consumer sans avoir porté Ton message à mon peuple !
Je crains ma faiblesse car je suis venu en ce lieu pour un tison
Et me voilà écrasé par le poids de Ton Décret !
Le poids de la Parole de l’Éternel est incommensurable.
משקלו של דבר ה ‘הוא לא מדיד
Gravitas verbi domini sine mensura est
إن ثقل كلمة الرب لا يقاس


Dumus orationem
Je suis l’arbre racine du musc et de l’encens !
Je plonge au plus profond des entrailles terrestre,
Jusqu’à son centre glacé et inhumain
Puis, je chemine au travers de la lave et du magma
Produisant le feu froid des alchimistes !
Par ma vertu, le Mont Horeb est sanctifié !
Et ne parvient à moi que le Choisi par Lui,
L’Homme qui a laissé derrière lui les deux mondes !
Par ma puissance, Sa Parole est proclamée
Comme un signe discriminant
Qui sépare la voie droite de la sinueuse,
Son Appel est un ordre pour tout l’univers
Qui courbe l’échine des tyrans
Et rend la liberté aux peuples enchaînés !

12 rajab 1442, 24 février 2021, 12 adar 5781